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JEAN FERRAT – MARIA
Vidéo publiée sur YouTube, par PatrickMarechal, le 1er. novembre 2009
Mon cœur pleure et mon cœur saigne.
Pleure pour la perte d’un grand poète humaniste et d’un grand musicien de qui je me sentais très proche par les idées qu’il défendait.
Et saigne, pour toutes les victimes disparues ou encore en vie, de cette guerre pour la liberté si lointaine et pourtant si proche de nous.
IN MEMORIAM.
Vue sur: YOUTUBE et espana36 – Charles FARRENY
Après la défaite contre Franco en 1939, beaucoup de républicains espagnols participent à la Résistance sur les terres de France. Août 1944 sonne l’heure de la Libération et la légitime aspiration à chasser Franco (ami de Hitler et Mussolini) pour rétablir la République et la démocratie en Espagne.
Les tentatives (offensive du Val d’Aran, maquis en Espagne) vont hélas échouer faute d’un soutien politique résolu de la part des démocraties occidentales. Ce qu’on appellera la "2e non-intervention". Une longue nuit s’abat alors sur l’Espagne jusqu’à la mort du dictateur en 1975.
A FEDERICO GARCIA LORCA
Les guitares jouent des sérénades
Que j’entends sonner comme un tocsin
Mais jamais je n’atteindrai Grenade
Bien que j’en sache le cheminDans ta voix
Galopaient des cavaliers
Et les gitans étonnés
Levaient leurs yeux de bronze et d’or
Si ta voix se brisa
Voilà plus de vingt ans qu’elle résonne encore
Federico GarcíaVoilà plus de vingt ans, camarades
Que la nuit règne sur GrenadeIl n’y a plus de prince dans la ville
Pour rêver tout haut
Depuis le jour où la guardia civil
T’a mis au cachotEt ton sang tiède en quête de l’aurore
S’apprête déjà
J’entends monter par de longs corridors
Le bruit de leurs pasEt voici la porte grande ouverte
On t’entraîne par les rues désertées
Ah! Laissez-moi le temps de connaître
Ce que ma mère m’a donnéMais déjà
Face au mur blanc de la nuit
Tes yeux voient dans un éclair
Les champs d’oliviers endormis
Et ne se ferment pas
Devant l’âcre lueur éclatant des fusils
Federico GarcíaLes lauriers ont pâli, camarades
Le jour se lève sur GrenadeDure est la pierre et froide la campagne
Garde les yeux clos
De noirs taureaux font mugir la montagne
Garde les yeux closEt vous Gitans, serrez bien vos compagnes
Au creux des lits chauds
Ton sang inonde la terre d’Espagne
O FedericoLes guitares jouent des sérénades
Dont les voix se brisent au matin
Non, jamais je n’atteindrai Grenade
"Bien que j’en sache le chemin"JEAN FERRAT
Mille neuf cent trente six. Le talon de fer de l’État et du capitalisme écrase l’Europe. En URSS le capitalisme d’État s’installe dans une dictature sanglante. En Allemagne c’est le cauchemar nazi. En Italie règne le fascisme mussolinien. Au Portugal, Salazar impose la terreur.
A l’opposé de cette domination bestiale qui étendra rapidement ses tentacules à tout le continent, les idéaux de liberté et d’égalité vont triompher un moment en Espagne grâce à la révolution sociale et libertaire du 19 Juillet 36.
Les militaires espagnols imbibés d’autoritarisme et de colonialisme, se sentaient un destin national de mercenaires au service des industriels et des grands propriétaires.
Quand ils firent leur coup d’État, le 18 Juillet 1936, ils pensaient que tout irait vite, qu’en Espagne comme ce fut le cas en Allemagne ou en Italie, la population se soumettrait à la brutalité de la force armée. C’est l’inverse qui se produisit . Contre les généraux traîtres il se leva dans les 24 heures un ras de marée révolutionnaire qui allait submerger non seulement les militaires fascistes mais également la bourgeoisie dominante. Dans leur calcul, les réactionnaires et les fascistes d’Espagne avaient oublié que le contexte social de ce pays était différent du reste de l’Europe. Depuis des décennies que se succédaient dans ce pays les grèves de solidarité et que se multipliaient les "aténéos" (centres culturels libertaires), il s’y était développé une culture d’auto-organisation. Les luttes dans les quartiers et dans les entreprises, menées par la base, avaient forgé une mentalité qui refusait la soumission. Les ouvriers et les paysans ne suivaient pas les politiciens. Contrairement à de nombreux pays dans ces années, le Parti communiste et le parti fasciste (en Espagne, les phalangistes) étaient groupusculaires. Cette situation inédite qui a permis la première défaite historique du fascisme fut l’oeuvre de l’anarchisme militant. La spécificité des militants anarchistes espagnols était d’être majoritairement issus des classes exploitées. D’origine paysanne ou ouvrière ils restaient dans leur milieu pour y mener la lutte de classe. A l’inverse de ce qui s’est produit en France, ils ne rejoignaient pas les appareils syndicaux réformistes. Ensemble, avec leurs collègues et avec leurs voisins, ils ont construit une fédération de groupes et de syndicats qui avaient tous pour projet le communisme libertaire et dont le fonctionnement et les tactiques essayaient d’être en cohérence avec leurs finalités.
En conséquence, Le 19 juillet 1936 vit non seulement la défaite des militaires factieux battus par le peuple en armes mais la naissance d’une révolution sociale et libertaire. Cette journée fut historique car la force et la confiance collective furent telles que spontanément des masses d’hommes et de femmes descendirent dans la rue pour s’opposer au coup d’État. Dans la plus grande partie du territoire on vit des militaires, au départ arrogants et prêts à toutes les brutalités, reculer devant des foules décidées à ne pas se laisser faire puis finir par se rendre au premier venu.
Tout comme ils avaient gagné leur liberté, tout aussi naturellement et dans un même mouvement les paysans se réapproprièrent les terres des grands possédants et les ouvriers prirent en main les machines. Dans les champs, surtout en Aragon, Valence et Catalogne, il y eut un regroupement des terres cultivées en commun au sein des Collectivités villageoises. Chacun était libre de participer ou pas à ces Collectivités. Mais même les plus sceptiques y adhéraient quand ils constataient que la Collectivité produisait mieux pour tous et avec moins de travail. Quant aux ouvriers catalans ils placèrent leur entreprise en auto-gestion et au service de tous.
Bien-entendu les privilèges, les traditions et l’obscurantisme religieux furent jetés par la fenêtre. Dans le pays de l’inquisition, on eut le droit de vivre en union libre ou de divorcer. C’était dans une atmosphère de liesse, de bonheur partagé et de fraternité que le peuple marchait vers un futur plus juste et plus humain en cet été de 1936.
Cela pouvait être contagieux. La bourgeoisie ne pouvait supporter un tel exemple. Elle était consciente de l’ampleur du vide politicien occasionné par la socialisation et l’autogestion des moyens de production qui ne laissaient aucune place aux gesticulations politiciennes. Le communisme libertaire était en marche et rendait inutile toute forme de pouvoir et de hiérarchie. Le premier acte des anciens dirigeants politiques fut d’inciter les anarchistes à participer à un gouvernement de front populaire. Ceux ci commirent l’erreur d’accepter. Certains, dont Fédérica Montseny, furent nommés ministres et ce n’est que trop tard qu’ils s’avisèrent d’avoir ainsi remis le pied à l’étrier aux adversaires de la révolution sociale. Ces derniers préféraient tout plutôt que l’émancipation sociale. lis allaient peu à peu accomplir leur travail de sape. Les politiciens professionnels socialistes et communistes, alors qu’ils ne représentaient rien, siégèrent également dans le gouvernement républicain unitaire qui fut de moins en moins symbolique et de plus en plus réactionnaire. De plus, le capitalisme avait de nouveau un pied dans chaque camp et pouvait manoeuvrer au niveau international.
Dans le camp fasciste, bien sûr, les nazis de Hitler et les chemises noires de Mussolini vinrent soutenir Franco. Dans le camp "démocrate", les bourreaux staliniens furent invités par les dirigeants républicains. Le but des uns et des autres était commun : écraser les libertés et liquider les militants et les conquêtes révolutionnaires. Après les journées de mai 1937 à Barcelone ceci se réalisa au grand jour. On assista alors à la répression ouverte contre les dissidents anarchistes ou marxistes, puis à la destruction des collectivités par les chars du Parti Communiste Espagnol. Ce fut la militarisation de la société. La transformation par la force de la révolution en une guerre traditionnelle, dont l’épisode culminant fut l’imbécile bataille de l’Èbre, n’apporta que du sang et des larmes.
Ce fut à l’aube de la deuxième guerre mondiale -dont elle constitua de bien des manières une répétition générale- que prit fin la guerre d’Espagne.
C’était en 1939.
Un militant.